Les talents d’Achil : Laetitia Larrue

Recruteurs : Stop au ghosting, place au feedback

Le ghosting, ou l’absence de communication de la part des recruteurs, fait grandement mal à l’expérience candidat. Il est alors temps d’explorer des méthodes concrètes pour instaurer une culture du feedback.

Dans le monde merveilleux de LinkedIn, tous les recruteurs semblent avoir de très bonnes pratiques, pourtant, ce sont encore 40% de candidats qui dénoncent le ghosting post-entretien et plus de 60% post-candidature, selon le baromètre de l’expérience candidat par Yaggo en 2024.

En parallèle, le site d’actualité Culture RH révélait dernièrement dans un sondage que 58% des professionnels RH assurent faire un retour systématique aux candidats.

Alors des questions se posent : Est-ce suffisant ? Pourquoi tout ce petit monde ne s’aligne toujours pas ? Pourquoi et comment se mettre au feedback ?

Laetitia Larrue, recruteuse indépendante spécialisée sur les fonctions opérationnelles, commerce et support, psychologue du travail et membre du collectif Achil, très engagée pour offrir une expérience de qualité à ses candidats, nous apporte ses éclairages.

 

Ghosting : une pratique aux origines inattendues

Le terme “ghosting” puise ses origines dans les relations humaines et plus particulièrement en amour. Phénomène observé sur les sites de rencontre notamment, il est devenu courant dans le domaine du recrutement.

L’autre disparaît sans laisser de trace, comme s’il n’avait jamais existé.

Selon la psycho-praticienne Cécile Guérêt, dans une interview sur Psychologies.com, cette pratique se résume à une “rupture radicale qui témoigne d’un rapport consumériste et utilitariste dans le rapport à l’autre, comme on le voit dans d’autres relations sociales, comme par exemple dans le travail avec des licenciements brutaux”.

La personne victime de ghosting se retrouve alors face à un flot incessant de questions sans réponse, de perte d’estime de soi, de frustration, voire même de honte.

Ce sont les mêmes effets pour les candidats ignorés. Et s’ajoutent ainsi de nombreuses conséquences néfastes pour l’entreprise et son image.

 

Petites erreurs, grosses conséquences…

La solution CareerArc indique que les candidats qui ne sont pas informés des suites de leur candidature sont 3,5 fois moins susceptibles de postuler à nouveau au sein de l’entreprise concernée, et 72% des candidats qui ont eu une mauvaise expérience déclarent avoir partagé cette expérience en ligne ou en direct à leur entourage personnel ou professionnel.

Un constat soutenu par Laetitia : “Personnellement, j’attache beaucoup d’importance à la communication tout au long du process que ce soit avec mes clients, ou avec mes candidats. Et c’est une attente réelle côté candidats, ils veulent du retour et de la communication.”

Elle en a d’autant plus conscience, ayant évolué pendant plus de 20 ans en tant que psychologue du travail au sein de l’AFEPT, Association pour la Formation et l’Education, qui œuvre pour l’insertion vers l’emploi.

Qu’il s’agisse de jeunes à la recherche d’un premier emploi, ou de personnes en reconversion professionnelle, elle a observé le besoin tout particulier d’accompagnement et ce quel que soit le profil.

 

Pourquoi des recruteurs pratiquent le ghosting ?

Laetitia : “Ça dépend beaucoup de la vision de chacun de ce qu’est un recruteur. Pour certains, le recrutement c’est avant tout une relation commerciale. Un candidat représente un chiffre. Au point d’en oublier malheureusement la dimension humaine.”

Il est intéressant de se pencher sur les raisons qui peuvent pousser à ne pas/plus prendre le temps de répondre aux candidats.

Pour elle, la raison principale est le manque de temps. En effet, sous la pression et un quotidien déjà surmené, des recruteurs n’arrivent plus à intégrer cette tâche dans leurs étapes de recrutement, qui pourtant devrait faire partie intégrante du job.

A ça, peuvent s’ajouter :

  • Le fait de recevoir trop de CV,
  • De ne pas se sentir à l’aise pour dire non à un candidat,
  • Ou encore, d’être fataliste avec le fameux “de toute façon, tout le monde le fait”.

 

Le feedback, un incontournable en recrutement

Il est temps de reprendre le contrôle de sa fonction et de faire des retours personnalisés à ses candidats.

Pourquoi ?

Il n’y a justement que des bonnes raisons d’après Laetitia :

  • Pour revalider les critères de recrutement et les attentes du poste en mentionnant bien les raisons pour lesquelles chaque candidature est rejetée,
  • Pour aider les candidats à comprendre pourquoi ils ne sont pas sélectionnés et les aider à améliorer leur recherche d’emploi ; son expérience et expertise en psychologie ont façonné cette approche,
  • Pour gagner leur confiance et bénéficier de leurs potentielles recommandations ; c’est ainsi qu’elle entretient son réseau,
  • Pour laisser une image positive et leur donner envie de re-postuler ; c’est aussi ça, alimenter son vivier candidat.

Enfin, il ne faut pas omettre que derrière chaque candidat, il y a éventuellement un client !

 

Maîtriser l’art du feedback négatif en 4 temps

Donner une réponse personnalisée et contextualisée pour chaque candidat, est-ce vraiment possible ?

Laetitia partage généreusement toute sa méthodologie.

 

1. Revenir sur le besoin

Avant de formuler un retour, elle reprend les bases : la demande initiale de son client.

A partir de  la liste des critères définis ensemble, elle met en lumière les points sur lesquels le ou la candidate n’aura pas la compétence correspondante et qui constitue donc un blocage.

C’est impératif, un feedback doit être factuel et objectif.

Il peut d’ailleurs s’appuyer sur un outil comme la scorecard, un outil très utile dont tous les enjeux et bonnes pratiques sont énumérés sur le blog de Taleez et pour lequel nous vous mettons un exemple à disposition.

 

2. Verrouiller les bonnes conditions

Il est effectivement crucial de veiller à ce que le candidat soit enclin à recevoir ce retour.

Laetitia réfléchit au rapport qu’elle a avec son candidat : Quel lien de confiance avons-nous ? Et est-ce que ce que je m’apprête à transmettre est constructif ?

Pour certains, la recherche d’emploi est très anxiogène et touche à leur assurance personnelle, un cadre bienveillant est donc plus qu’indispensable.

Mais elle estime que les recruteurs eux aussi, doivent être dans un environnement favorable pour réaliser un feedback.

Laetitia : “Faire un feedback, ça demande de prendre de la distance. Je retrouve à nouveau un parallèle avec ma posture de psychologue, puisqu’il s’agit d’avoir de l’empathie, tout en acceptant qu’on ne peut pas non plus sauver tout le monde.”

 

3. Choisir le format

Qu’il soit oral ou écrit, il se structure. Dans son cas, Laetitia favorise le retour à l’écrit, car à la différence de l’oral, il est plus tangible et peut servir de point de référence.

Cependant, en fonction de la relation et/ou du stade, il lui arrive de le compléter d’un appel, en proposant justement un RDV dans son feedback écrit.

Il existe par ailleurs une multitude de modèles pour bien articuler son feedback. Une des plus connues est la méthode DESC, décrite dans ce post LinkedIn de Luc Glinche, Chef de projet marque employeur pour la ville de Marseille.

Décrire ➡️ Donner les faits. Sans subjectivité, juste des faits.

Exprimer ➡️ Dire ses sentiments. Utiliser le « je ».

Spécifier ➡️ Faire suggérer ou suggérer des solutions.

Conclure ➡️ De manière positive de préférence. Dire ce qu’on peut gagner.

 

4. Agrémenter de conseils

Pour aiguiller au mieux son candidat à travers ses retours, Laetitia aime ajouter :

  • Des conseils CV ou post-entretien, pour s’améliorer,
  • D’autres annonces en cours, qui pourraient lui correspondre,
  • Des contacts de son réseau, notamment au sein du collectif Achil.

Le partage de mission entre membres fait partie du modèle de rémunération proposé par Achil, leur permettant de se rétrocéder des honoraires. Voilà de quoi encourager la recommandation entre recruteurs auprès des candidats.

 

Au-delà du feedback : la culture du feedback

Et si finalement c’était une question de culture ?

Le feedback, c’est être aligné entre ce que l’on promet et ce que l’on fait. D’après Laetitia, c’est une valeur très forte au sein du collectif, dans laquelle elle se retrouve.

Le feedback, ça s’apprend. Il est important de se former et de se sensibiliser à cette pratique et elle fait justement partie du programme de formation proposé par Achil à tous ses recruteurs.

Le feedback, c’est cultiver du lien avec ses candidats et ça fonctionne ! Les nombreux témoignages reçus par Laetitia en sont la preuve, comme celui-ci :

“Je vous remercie pour votre exceptionnelle réponse, et argumentée de surcroît à ma candidature. L’événement est si rare qu’il mérite d’être souligné. Si vous ne trouviez pas dans un délai raisonnable le candidat correspondant tout à fait à vos critères, n’hésitez pas à me recontacter pour ce poste.”

En conclusion, le feedback, c’est redonner du sens à son rôle de recruteur et avoir un réel impact. Et ça, ça vaut tous les arguments du monde.

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